Moi, biographe

D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours aimé écrire. La légende familiale conte que mes premiers mots aient été « papier-crayon ».
Dès que la possibilité de savoir lire seule m’a été offerte, je me suis plongée dans la littérature, que je n’ai jamais quittée depuis. Mon enfance a une odeur de bibliothèque poussiéreuse puis, au fil des ans, de médiathèque colorée ou de bibliothèque universitaire épurée. J’ai dévoré tout ce qu’il m’a été donné de lire, seule et accompagnée de mes professeurs de collège, lycée et faculté de Lettres. J’ai aimé d’amour fou Molière en quatrième, Steinbeck, en troisième, d’un amour non moins sincère Musset et Sagan – que l’on n’étudiait cependant pas – au lycée. J’ai rencontré Dostoïevski, Duras et Faulkner à la fac, je me suis éprise d’un nombre inavouable d’héros ou d’anti-héros anglais du XIXème ou du début du XXème siècle…
Il m’a toujours été difficile, comme l’a relevé Marcel Proust, d’avoir « aimé en vain, pour une heure, des êtres qui demain ne seraient plus qu’un nom sur une page oubliée[1] ». C’est peut-être pour cela que j’en suis venue à l’écriture. Pour faire vivre un peu plus longtemps les personnages, pour me réinventer, aussi, parmi eux. J’ai noirci tant de journaux intimes et tant de pages de blog littéraires !
Cependant, il faut reconnaître que je suis aussi arrivée à l’écriture par jalousie. Je me suis rêvée mille fois George Sand, quelques fois Sarah Kane. Un jour, à la fac, j’ai lu Lambeaux, de Charles Juliet. Cette autobiographie m’a touchée ; l’écriture à la deuxième personne m’a saisie. Saisie de curiosité et de vénération. Je me suis sentie comme prise d’une fièvre pour cette forme très particulière. J’ai pensé qu’il me fallait écrire, écrire à la deuxième personne ou me taire…
Depuis, j’ai « grandi », j’ai enseigné durant dix ans la littérature, l’orthographe et la grammaire et j’ai admis que d’autres formes d’écriture que celles de mon amour de vingt ans étaient possibles. J’ai appris, aussi, à écouter. En 2022, je me suis formée au récit autobiographique à l’Université des Lumières à Lyon.
[1] Marcel Proust, Sur la lecture, Actes Sud, 1993.
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